Pièce maîtresse de l’album, «Burn out» est bien sûr l’expression derrière la traduction savante de «Brûler dehors».

On ne parle pas souvent de l’épuisement. On le voit comme un échec, comme une honte. Prendre son temps, se reposer, admettre qu’on n’en peut plus; ce n’est pas quelque chose de particulièrement encouragé de nos jours. On veut des résultats, on veut avancer à tout prix. Peut-être est-ce aussi une pression que certains vivent moins bien que d’autres, ou qui pèse plus lourd sur certaines épaules…

Parfois, il n’y a pas d’autre option que de s’arrêter. Et c’est ce que j’ai fait. Je n’ai jamais vraiment cru que je ne reviendrais pas à ma musique, mais j’en ai été dégoûtée. Désagréable et aigrie, j’ai bougonné pendant des années sur notre industrie qui, selon moi, m’avait poussée à bout. Et je ne suis pas certaine d’avoir terminé, mais je le fais maintenant avec plus d’humour.

«Burn out», qui était d’abord titrée «Les outils», est le début du retour. C’est avec ce texte que j’ai commencé à entrevoir la possibilité de produire un second album, mais différemment, plus doucement. C’est aussi avec ce texte que j’ai commencé à faire la paix avec ma colère, mes mensonges, mes détours. J’ai réalisé que j’avais toujours besoin d’écrire pour moi, mais que j’avais aussi besoin de partager ce que j’avais vécu, justement parce que je ne suis pas la seule. Et si la musique reste dans les tiroirs (ou plutôt dans les ordinateurs), elle ne vit pas, elle ne résonne pas, elle ne nourrit pas les autres.

Sur l’album, tous les instruments de base ont été enregistrés en même temps. Vous pouvez donc écouter la partie où il n’y a qu’une guitare en imaginant Olivier Bernatchez (batterie) et David Bujold (basse) attendre patiemment la fin de la pièce pour faire leur entrée fracassante. Quelques guitares et effets sonores ont été ajoutés ensuite..

 

BURN OUT

Je n’ai pas barré la porte, j’ai laissé traîner un tas d’histoires au sol, effleurées
Mes outils restés par terre, j’ai fui sans regarder derrière, abandonné le chantier
J’ai poussé jusqu’à mentir, cloué jusqu’à ne plus me sentir… toujours aller, toujours gagner
Jusqu’à clouer les doigts, le pouce, la foi, le cœur les projets la passion les douleurs
Et tomber à plat, plus le choix

Des fois je voudrais des forces, au moins reprendre des forces et la fermer pour l’hiver
Ma maison, ma carrière

Et le pire c’est qu’on m’en veut, tout lâcher ça ne fait pas d’envieux
On parle bas, on pointe du doigt
On voudrait que je me batte, que j’finisse de polir les lattes
On s’en reparlera ! Reprends sur toi !
J’ai poussé jusqu’à mentir, cloué jusqu’à ne plus me sentir
Toujours plus loin, toujours mieux

Pis là, j’ai fui, je lèche mon pouce

Je vois de loin que personne perd son temps, pis j’attends de retrouver le cœur de me vider les tripes sur la table du contremaître, qui lui attend juste une autre raison de me bouffer l’espoir, mon espoir, mon talent, mes paroles pis mon âme à l’encan…

On dit qu’y faut bâtir sa carrière quelque part avant trente ans

Faites ce que vous voulez des chambres, du plancher et des fenêtres blanches
Si ça m’arrange, je reviendrai

Des fois je voudrais des forces, au moins reprendre des forces et la fermer pour l’hiver
Ma maison ma carrière